Interview avec Hystra
InterviewInterview avec Lucie Klarsfeld
“Bonjour Lucie, pouvez-vous vous présenter, ainsi que votre entreprise ?
Je m’appelle Lucie Klarsfeld, j’ai 35 ans et deux enfants, j’ai rejoint Hystra en 2009 et suis associée depuis 2018. Quand j’ai rejoint Hystra, la société venait juste d’être créée. Nous étions trois dans l’arrière-boutique d’une galerie d’art. Maintenant, nous sommes une vingtaine avec quelques collaborateurs en Afrique. Nous sommes une entreprise de conseil en stratégie hybride ou en “inclusive business”. Nous avons commencé en travaillant avec des grands groupes, comme Engie, Total, Danone etc.
Aujourd’hui nous travaillons de plus en plus avec des entreprises sociales plus petites, ou des entrepreneurs sociaux qui ont monté leur structure, ou encore avec des investisseurs qui s’intéressent aux problématiques sociales et qui cherchent à pérenniser leur impact en travaillant sur des projets, dans la durée. Un de nos plus gros clients est par exemple la Fondation Gates avec laquelle nous travaillons sur des sujets de nutrition, d’assainissement et de santé des femmes. Nous les aidons à développer des partenariats avec des entreprises privées et à industrialiser des produits à fort impact.
D’autres aspects de notre métier nous différencient de cabinets de conseil en stratégie plus classiques. Nous faisons office de pont entre des acteurs, des secteurs qui sans nous ne pensent pas ou ne parviennent pas à collaborer.
Nous travaillons entre ces fondations et des grandes entreprises, pour assurer la promotion de ces projets. Nous travaillons à créer des coalitions et des alliances qui permettent d’avoir un plus grand impact sur la société. Par exemple : nous avons aidé à fonder le Toilet Board Coalition, pour aider à promouvoir l’accès à l’assainissement, et aux toilettes dans différentes géographies à travers un mix d’assistance technique et de subventions. Le problème de l’assainissement ne peut être résolu avec un seul acteur. Il y a besoin de beaucoup d’entreprises et de métiers différents qui apportent chacun une partie de la solution. Voilà pourquoi nous avons aidé à construire cette alliance.
Vos collaborateurs sont en France ou répartis dans le monde ?
En temps normal, la plupart sont à Paris. Depuis le Covid, nos collaborateurs européens sont rentrés auprès de leurs familles. Certains viennent d’Italie, d’Allemagne, du Royaume-Uni, de Suisse.
On a l’un de nos consultants au Burkina Faso en détachement. Depuis deux ans, nous faisons tourner nos consultants par période de six mois à un an pour apporter notre expertise au projet Meriem que nous menons en partenariat avec le Gret et 6 autres acteurs.
Nous travaillons avec des partenaires locaux, que nous appelons Network Partners, qui ont leur propre structure de conseil. L’un d’eux qui est en ce moment très actif, travaille sur un projet en Inde. Il y en a d’autres en Amérique Latine et en Afrique.
Nous travaillons aussi en partenariat avec d’autres organisations qui ont des capacités sur le terrain.
Vous êtes très tournés vers l’international, comment la situation depuis un an vous a-t-elle impactée ? Avez-vous vécu de grands changements dans votre manière de procéder ?
Pendant les confinements, nous avons eu un ou deux mois de flottement. On avait plusieurs lancements de projets pilotes, notamment avec la Fondation Gates. Trois d’entre eux ont été mis en pause. Mars et avril 2020 fut une période d’incertitude. Certaines activités ont pu reprendre en juin 2020 et ont même accéléré. Dans le cadre du Global Distributors Collective que nous avons aidé à monter et co-dirigeons avec Practical Action et BopInc, nous avons fait des séries webinaires pour échanger sur des best practices pour surmonter la pandémie. La plupart de nos projets ont été relancés, et nous avons fait une année 2020 plutôt bonne, et 2021 semble l’être aussi.
Comment nous sommes-nous adaptés niveau process ? Nous étions déjà habitués à travailler sur plusieurs fuseaux horaires, que ce soit avec la Fondation Gates, ou nos partenaires et collaborateurs répartis aux quatre coins du globe. Déjà en temps normal, nous étions habitués à travailler à distance sur la durée, plutôt que comme une équipe sur place intégrée.
Une des choses qui nous rend attractifs auprès de nos consultants, c’est cette possibilité de voyager, ce côté international, d’être en contact avec des entrepreneurs et clients étrangers. Mais c’est quelque chose que nous n’avons pas pu faire depuis un an.
Nous avons fait comme tout le monde et avons commencé à utiliser Teams et Zoom. Notre équipe est passée en télétravail complet au début puis nous avons alterné en équipe réduite entre le bureau et chez nous suivant les différents confinements. On s’adapte, nous avons créé des événements d’équipe, des soirées pub quizz par zoom. On a essayé de faire en sorte que tous nos consultants soient dans les meilleures conditions possibles en leur indiquant dès octobre 2020 qu’on ne leur demanderait pas de revenir en France avant juillet 2021, afin de permettre à ceux qui le souhaitaient de rentrer dans leur pays. Nous avons aussi aidé nos consultants à s’équiper pour travailler de chez eux en leur fournissant les équipements nécessaires pour rendre le télétravail un peu moins pénible.
Extrait de l’interview
Attendez-vous la réouverture des bureaux ? Est-ce que le full remote a de l’avenir selon vous ?
Nous attendons avec impatience la possibilité de rouvrir. Nous sommes une petite structure, mais il y a vraiment un esprit d’équipe très fort. A part mes deux associés qui ont la cinquantaine passée, nous ne sommes que deux à avoir des enfants. Toute l’équipe a entre 22 et 35 ans. On aime bien se voir et faire la fête. Donc juste pouvoir se voir au bureau est déjà bien, je n’ai pas de doute que tout le monde veuille revenir. Quand nous avons réouvert à mi- jauge en septembre, nous avons dû demander à certains de se désinscrire, nous étions trop nombreux à vouloir revenir !
Nous sommes dans un métier où il y a beaucoup d’interactions, nous apprenons tous – surtout les jeunes – en faisant des brainstormings. C’est en effet plus difficile de faire cela en restant concentré sept heures devant son écran plutôt qu’en direct. Malgré tout, nous nous sommes rendu compte que nous y arrivions mieux que ce que l’on pensait. C’est pourquoi, quand ça va reprendre, nous envisagerons de laisser la possibilité à chacun de rester un ou deux jours par semaine en télétravail. Nous en discuterons en équipe pour trouver la meilleure formule pour tous, en prenant en compte le fait que les jeunes ont encore besoin de baigner dans la structure pour progresser et rester motivés.
Avec vos partenaires, sur les différents projets déjà à distance, ça n’a pas tant changé que cela ?
Ce qui a changé, c’est que nous avons certains projets qui ont démarré depuis la pandémie où nous n’avons pas du tout pu rencontrer les gens sur le terrain. Nous mettons plus de temps à construire des relations de confiance sur ces nouveaux projets.
Vous parliez de l’année 2021 qui a l’air de bien démarrer, y a-t-il eu un vrai changement dans cette approche de l’inclusive business, de l’entreprise à impact? Est-ce quelque chose qui est réellement en train de progresser ? Est-ce que cela fonctionne mieux parce qu’on est au pied du mur ?
Il y a une prise de conscience collective des consommateurs, et des employés qui demandent de plus en plus de sens dans ce qu’ils font ou ce qu’ils achètent. D’autre part, comme les ressources philanthropiques sont rares – ce qui est encore plus accentué avec la pandémie et les conséquences économiques de la crise qui ont aussi touché les fondations et bailleurs de fonds – il y a une volonté de la part des entreprises de rapprocher leurs activités philanthropiques, la responsabilité d’entreprise et leurs activités “core business”. C’est impressionnant de voir le nombre d’entreprises qui réfléchissent par exemple à monter un fonds à impact en ce moment, comme l’a bien documenté l’EVPA.
Avez-vous des prévisions de recrutement pour 2021 ?
Nous avons recruté trois consultants en CDI en 2020 et prévoyons d’en recruter au moins deux, peut-être trois cette année. Nous avons un nouveau Network Partner européen qui nous a rejoint, basé à Londres, qui a fait la plus grande partie de sa carrière en Afrique, en partie dans le conseil, en partie avec l’ONG TechnoServe, et en partie avec la banque Barclays. Nous cherchons ce genre de profil hybride, des gens avec de l’expérience business assez forte, et qui ont aussi cette sensibilité pour les sujets sociaux et environnementaux.
Si vous aviez un feedback ou une recommandation à donner à quelqu’un qui voudrait se lancer dans le conseil et sur ce que ça peut apporter, qu’est-ce que vous lui diriez ?
Le conseil en stratégie « classique », apporte des méthodologies et des façons de réfléchir très intéressantes. C’est une expérience qui apprend à poser les problèmes, prendre des décisions efficaces pour le meilleur résultat possible. Ça permet de travailler sur toute une diversité de sujets, d’apprendre constamment de nouvelles choses sur de nouveaux domaines.
Ce qui nous différencie est le fait que nous travaillons uniquement sur des modèles qui utilisent l’entreprise pour maximiser un impact social et environnemental. Cela nous amène à travailler à beaucoup de niveaux, avec des interlocuteurs très variés qui peuvent aller du petit agriculteur en Inde au chef d’entreprise à Madagascar au Vice Président d’une entreprise du CAC40.
Faire du conseil chez Hystra convient bien aux gens qui ont envie de ce genre d’expérience hybride, qui veulent combiner impact social et environnement business, visites de terrain et présentations auprès de conseil d’administration de grands groupes, empathie et rigueur analytique. Avec l’objectif de faire passer à l’échelle les innovations sociales et environnementales que notre monde mérite.
Merci Lucie pour tout cela, c’était très intéressant.”
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